Après mes études, je me suis impliqué dans plusieurs initiatives associatives liées à l’agriculture urbaine. J’ai participé aux premiers projets d’agroécologie à Bruxelles avant de rejoindre un bureau d’études spécialisé dans les projets éoliens et les infrastructures routières et électriques, toujours dans une perspective environnementale. À cette époque, l’agriculture urbaine en était encore à ses débuts et les projets étaient bien moins développés qu’aujourd’hui.
Par la suite, j’ai travaillé à Gembloux en tant qu’assistant de recherche, où j’ai collaboré avec diverses institutions, architectes, et entreprises pour intégrer l’agriculture au cœur des villes. Grâce à ces expériences, j’ai été sollicité pour divers projets, ce qui m’a conduit à lancer mon activité en tant qu’indépendant. Pendant la pandémie de Covid-19, j’ai découvert l’offre pour le poste de directeur de la ferme Maximilien. Attiré par ce projet ambitieux de modernisation et de transformation de la ferme, j’ai postulé et ai été sélectionné. Depuis, je m’investis pleinement dans le développement et le rayonnement de la ferme au Parc Maximilien.
Alexandre, qu’est-ce que l’agriculture urbaine ?
L’agriculture urbaine consiste à produire en ville. Bien que ce concept puisse sembler nouveau, il existe depuis toujours. La production urbaine a cependant perdu de son importance dans les pays occidentaux avec l’essor des infrastructures de transport international et des technologies de conservation, comme les frigos, rendant possible une indépendance quasi-totale aux importations extérieures.
Ailleurs, dans des régions d’Afrique, d’Asie et d’Amérique du Sud, l’agriculture reste intégrée aux villes. Un exemple marquant est Cuba, où, à la suite de l’embargo pétrolier des États-Unis, l’agriculture urbaine s’est considérablement développée. En Europe, l’agriculture urbaine a regagné en popularité entre 2008 et 2012 pour des raisons pédagogiques, écologiques et de gestion des déchets. Bruxelles se distingue aujourd’hui par son dynamisme, avec plus de cinquante projets d’agriculture urbaine professionnelle, dont celui de la Ferme du parc Maximilien.
Peux-tu nous expliquer l’Agroécologie et ses multiples dimensions ?
L’agroécologie s’intéresse aux interactions entre les systèmes agricoles et les écosystèmes, en cherchant à les rendre plus durables. Cette discipline repose sur trois piliers fondamentaux : le social, l’économique et l’environnemental. Elle vise notamment à promouvoir une redistribution équitable des ressources, l’accessibilité alimentaire pour tous, et un juste revenu pour les producteurs, tout en limitant les impacts environnementaux.
Mon parcours reflète à la fois l’approche scientifique et les enjeux sociaux de l’agroécologie. À mes débuts à Bruxelles, notamment dans des quartiers comme celui de Cureghem à Anderlecht, j’ai observé de près ces défis sociaux, qui restent d’actualité dans les initiatives de la Ferme du parc Maximilien.
La Ferme du parc Maximilien : un modèle de cohésion sociale
Créée en 1987, bien avant l’essor de l’agriculture urbaine en Europe, la ferme est l’une des premières fermes urbaines d’Europe. Son objectif initial était de reconnecter les citadins avec le monde agricole à travers une approche pédagogique. Aujourd’hui, ses ambitions vont bien au-delà.
La ferme sensibilise le public aux enjeux écologiques, au bien-être animal et à l’importance de la biodiversité. Mais surtout, elle agit comme un levier pour la cohésion sociale et la réinsertion socioprofessionnelle. Ce projet communal, porté par la Ville de Bruxelles, est conçu pour répondre aux besoins du quartier tout en créant un espace sécurisé et atypique au sein du parc Maximilien.
Accessible gratuitement, la ferme organise des activités payantes, comme des visites guidées, des stages pour enfants, des anniversaires, des team buildings, ou encore l’entretien de potagers collectifs. Ces initiatives rassemblent des publics variés et renforcent les liens au sein de la communauté, tout en augmentant l’impact de la ferme dans le quartier.
Vos activités traitent de quoi ?
Nos thématiques principales sont le bien-être animal, la biodiversité, l’agriculture urbaine, la cohésion sociale et l’éducation active à l’environnement. À travers ces thématiques, nous organisons divers événements et initiatives. Par exemple, nous accueillons chaque année la journée du bien-être animal de la ville de Bruxelles.
Actuellement, nous participons au mois consacré à la thématique de l’eau dans la région bruxelloise, avec la campagne « Ici, commence la mer ».
Vous avez peut-être aperçu en ville des graffitis éphémères près des bouches d’égout.
Réalisés avec une peinture écologique, ces derniers sensibilisent les citoyens au fait que jeter des déchets dans les égouts peut les faire finir dans la mer.
Ces activités impliquent des enfants du quartier, des entreprises, des visiteurs, et des bénéficiaires, selon nos opportunités et notre calendrier.
En fonction des financements et des projets, nous réalisons des actions à fort impact, comme dans le cadre du contrat de quartier durable.
Nous sommes impliqués dans trois projets différents : un avec Atelier Grooteiland, un avec ABC et un que nous développons pour végétaliser le quartier. Par exemple, l’année dernière, nous avons travaillé sur les balcons du Foyer Laekenois, et cette année, nous visons à végétaliser de grandes façades du quartier et d’entreprises avec des plantes grimpantes pour un effet visuel significatif. Nos activités sont donc variées et évoluent selon les opportunités.
Qu’est-ce qu’un laboratoire “low tech” ?
Un laboratoire “low tech” est un espace dédié à l’expérimentation et à l’innovation simple, accessible et durable. Contrairement à une ferme axée sur la rentabilité agricole, nous testons des idées écologiques qui ne nécessitent pas de technologies complexes.
Par exemple, nous utilisons des bacs potagers avec une réserve d’eau ingénieuse et minimaliste. Ces bacs fonctionnent par remontées capillaires à partir de billes d’argile, sans pompe, panneau solaire ni électricité. De même, nous avons expérimenté un compostage rapide utilisant des larves de mouches. Ces techniques sont faciles à reproduire et à réparer, tout en ayant un impact écologique significatif.
Grâce à notre espace, nos animatrices et la diversité du public, nous pouvons tester une grande variété d’innovations “low tech”.
Est-ce que tu es habitant du quartier nord ?
Non, je n’habite pas le quartier nord actuellement, bien que j’y aie vécu longtemps à proximité du canal, notamment à Anderlecht. Aujourd’hui, je réside à Auderghem.
En résumé:
La Ferme du parc Maximilien est un projet de la ville de Bruxelles créé en 1987. Elle continue à évoluer et se réinventera dans les prochaines années, avec un déménagement prévu dans les cinq ans. Ce lieu atypique est un poumon vert au cœur de la ville, où tout le monde est bienvenu pour organiser des fêtes, anniversaires, stages ou simplement pour profiter d’un espace qui contraste avec la vie urbaine bétonnée et bruyante.
Nous collaborons activement avec le CPAS de Bruxelles pour offrir des opportunités d’emploi, notamment des contrats article 60, qui permettent à des personnes sous CPAS de travailler dans des domaines tels que l’entretien, le nettoyage ou les soins aux animaux.
Nos activités incluent la gestion des déchets, la production de légumes, la distribution de plantes gratuites, la végétalisation du quartier, ainsi que des stages pour les étudiants, quel que soit leur domaine d’étude. La ferme propose des opportunités pour des associations, entreprises, personnes âgées, jeunes, et résidents du quartier nord. Nous offrons un large éventail d’activités toute l’année, permettant à chacun de trouver son bonheur et de se reconnecter avec l’écologie.